Dans le domaine de la langue, les luttes d’identité sociopolitiques se poursuivent sans relâche. Dans cette série, nous allons examiner certains des termes les plus importants de l’anglais moderne qui reflètent les changements survenus dans notre monde moderne par le biais de la langue.
Que veut dire LGBTQ ?
Les mots suivent l’évolution des réalités ou des perceptions de ces réalités. Un glossaire sur la diversité sexuelle et de genre a été mis en ligne par le Bureau des traducteurs du gouvernement fédéral. Le dictionnaire français-anglais connu sous le nom de florilège contient 193 mots.
C’est le contraire de « out of the box thinking », et les mots « dissimulation » et « concealment » s’y retrouvent pour le décrire. On peut s’adonner au « mégenrage », qui se définit comme « l’activité consistant à attribuer à une personne un genre qui ne correspond pas à son identité. »
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Le texte anglais dénote « queer » et ses dérivés « queer person », « queerphobia » et « queerphobic ». Alors que « queer » et « queerphobia » figurent parmi les « autres désignations » dans le dictionnaire français, « allosexuelle » et « autres déclinaisons » comme « allophobie » sont privilégiés.
En fait, « queer » l’emporte également en français, et « allosexuel » ne semble pas être sur le point de s’imposer.
Une recherche rapide permet de constater que le journal français Le Monde a utilisé le mot « queer » 35 fois l’année dernière, que ce soit comme nom ou comme adjectif. Pendant la même période, ce mot a été utilisé une fois de plus (pour un total de 36 fois). Sept fois en tout, avec des connotations presque toujours négatives, elle est citée dans Le Figaro.
En revanche, en un an, sur des dizaines de milliers de pages, le mot « allosexuel » n’apparaît que six fois dans tous les médias francophones canadiens et une fois dans tous les médias francophones européens. La faute en revient donc au magazine Le Point, qui fait un usage inhabituel du terme en incluant l’expression « c’est-à-dire non asexuel » dans les insertions parénétiques de la définition. Ah bon.
Un cas d’erreur d’identité
Être queer est une autre affaire dans le courant dominant de l’anglais et du français d’aujourd’hui. Qu’est-ce que ça veut dire ? Que signifie la lettre Q dans l’alphabet gay élargi des LGBTTQQIAAP + ? (À propos, le deuxième « Q » de l’emblème sert à rappeler les personnes interrogées).
Le dictionnaire de la diversité canadienne offre une définition simple : « une personne dont l’orientation sexuelle ou l’identité de genre diffère de la vision binaire normative du genre et de la sexualité ».
Certes, Antoine Damiens partage cette vision, mais avec subtilité. Un nouveau numéro de LGBTQ Film Festivals vient de paraître. Putting a Curate’s Touch on Queerness (Amsterdam University Press). Il poursuit ses recherches postdoctorales à l’Université McGill et travaille à deux livres : l’un sur les effets du SRAS sur les festivals de cinéma et l’autre sur la notoriété du film Les nuits fauves (1992) de Cyril Collard, qui traite de la pandémie de sida. Un film qui a fait un bide aux États-Unis et au Canada anglais, mais qui a connu un énorme succès en France et au Québec.
Il explique : « Le jargon local est alambiqué. Si je fais une recherche historique, j’utilise les termes de l’époque. Les origines du mot « queer » remontent au début des années 1990. Il est donc un peu gênant de l’utiliser pour parler d’événements qui ont eu lieu dans les années 1970. C’est à cette époque que les gens ont commencé à s’identifier moins comme gays et plus comme gais. La plupart du temps, j’utilise indifféremment les deux termes lorsque je parle de la vie moderne.
Chacha Enriquez tient à ce que le nom conserve ses connotations politiques initiales, même s’il a été récupéré par le groupe qu’il était censé insulter. M. Enriquez est professeur de collège et responsable du premier cours de sociologie LGBT offert à l’Université du Québec à Montréal. En ce qui le concerne, il est un activiste queer.
« Le mot « queer » signifie « bizarre » en français. Il a été détourné et récupéré lors de la lutte contre l’épidémie de sida à la fin des années 1980, dit-il, notant que le mot français pour « valise », « transpédégouine », a été proposé comme équivalent avec la même logique simple. Il s’agit d’un mouvement politique et social qui vise à mettre fin à la discrimination fondée sur le sexe, l’orientation sexuelle ou l’apparence physique d’une personne. Le projet est de se détacher du mouvement gay et lesbien et de construire une coalition de groupes et d’individus marginalisés et opprimés sur l’axe du genre et de la sexualité.
Avec sa critique de l’hétéro normativité, de la masculinité toxique et du patriarcat, la théorie queer fournit un cadre théorique à ce mouvement. C’est plus délicat car nous essayons de sortir du raisonnement linéaire de notre ennemi, comme le dit le sociologue. Cependant, la cis normativité est un type d’oppression qui nécessite une résistance active. Nous luttons tous contre les contrôles conventionnels que la société exerce sur nos orientations sexuelles, nos identités de genre et nos corps physiques.